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Extrait du communiqué de presse : " Depuis 2 ans, Tanja Martinho Alves et Sylvain Merot organisent des expositions dans leur galerie. En septembre 2005, ils proposent une définition de l’illustration d’aujourd’hui en invitant 14 illustrateurs à montrer une série de travaux. En mars 2006, 3000 fourmis de papier envahissent l’espace de la galerie. En avril 2006, 22 artistes mettent à disposition leur créativité autours du thème du poil. Plus récemment, en mars 2007, Kwerbeet, un collectif de Frankfurt utilise des assiette comme support à illustrer.
Pour le 2ème anniversaire de la Galeria Pequena, la mort sera le sujet des dernières créations de Tanja et Sylvain. Fidèle à son esprit décalé, la galerie donnera à voir des travaux ou l’humour et l’étrangeté primeront. En partenariat avec l’éditeur français Black Cat Bones, la sérigraphie sera pour la première fois à l’honneur dans la galerie (une affiche folle par les Frères Guedins qui illustre le film culte 'El Topo' et une autre affiche de Navette qui illustre la violence des films de Tarantino). Une série de film réalisé par Anne Katerin Holz montrent comment des créatures étranges ont disparut de la planète. De bois ramené par la mer, Céline Ranger en fais des sculptures de personnages étranges et poétiques. Les illustrations de Uli Knörzer nous plongerons dans son univers doux et mélancolique à la fois.Le vernissage de l’exposition aura lieu le samedi 2 juin. Bercé par la bossa nova de Dominik Herrmann, la journée sera rythmé par une tombola artistiques ou les prix ne seront autres que les objets et les œuvres de la Galeria Pequena."
Je n'ai pas l'habitude de crier au génie. Ceux qui le font à tout bout de champs ont le don de m'agacer au plus haut point. Mais vu que je pratique assez peu ce sport, je me permettrais de m'écarter momentanément de ce parti pris.
Depuis quelques jours, le démentiel dernier film d'Alfonso Cuarón LES FILS DE L'HOMME est enfin disponible en DVD. Massacré en salle à sa sortie par son distributeur français (mal distribué avec peu de copies en VO, maladroitement promotionné, projections presse tardives, peu d'échos dans les médias), ce film avait tout de même tenu l'affiche de nombreuses semaines grâce à un spectaculaire bouche à oreille. Espérons que la sortie DVD saura rendre justice à ce film qui est de loin ce que le cinéma anglo-saxon a produit de mieux depuis ce début de siècle (même si son réalisateur est Mexicain).
Qu'est-ce qui fait des FILS DE L'HOMME un film si précieux ? Je répondrais qu'au regard du gros de la production cinématographique mondiale, peu de films parviennent à nous parler avec justesse du monde dans lequel on vit (dans le lequel on vit REELEMENT, je veux dire, ceux qui ont dit que LES FILS DE L'HOMME est un film "visionnaire" sont ceux qui ne savent pas regarder le présent). La mise en scène étant en soit le discours, il arrive parfois qu'un réalisateur, en plus de tenir entre ses mains un scénario cohérent, en phase avec son époque, parvienne à donner une authentique forme à un lot d'idées et de concepts jetés sur papier.
LES FILS DE L'HOMME c'est ça, un film regardant droit dans les yeux notre vieux monde en proie à tout les nihilismes, et réussissant le tour de force de le radiographier à travers une mise en scène d'une rare élégance et d'une vigueur vraiment inhabituelle dans une grosse production de ce genre : Migration de l'esthétique du reportage de guerre dans le champs de la fiction, plans séquences de folie mais jamais gratuitement démonstratifs, brutale intrusion de la violence dans le champs au moment où rien ne la laissait présager (putain, si on est pas là face à un équivalent fictionnel des images amateur de cet homme qui a malgré lui filmé le boeing qui s'est crashé dans la première des Twin Towers, je veux bien qu'on me coupe ma langue de faiseur de théories moisies), des tonnes de plans d'une force saisissante, un casting frôlant la perfection, etc.
Ai-je besoin d'en rajouter ? Ce film, on en parlera sans aucun doute encore dans une 50aine d'années comme d'un grand classique (et pas que du cinéma de genre). On prends les paris ? En attendant, vous savez ce qu'il vous reste à faire.
C'est désormais officiel, BLACK CAT BONES s'associe avec le CINEMA COMOEDIA de Lyon pour organiser l'exposition
"SOUS LE SIGNE DU B" série B & sérigraphie
Cette expo regroupera les affiches de notre propre série "SOUS LE SIGNE DU B" (série d'affiches fictives de films non-fictifs dédiée au cinéma d'exploitation des années 70) ainsi qu'une sélection d'affiches issues de diverses collections privées (des affiches du ALAMO DRAFHOUSE CINEMA, Austin/Texas, ainsi que des affiches du QUENTIN TARANTINO FEST). Soit une quinzaine de pièces au total.
Le vernissage quant à lui aura lieu le mercredi 06 juin à partir de 18h30, en inauguration de la sortie du dernier film de Tarantino DEATH PROOF (ouais, le titre anglais claque plus que le titre français : Boulevard de la Mort).
L'expo se poursuivra ensuite jusqu'au mardi 04 juillet. L'affiche de l'expo sera dessinée par Der Komissar. Un tirage sérigraphié sera bien évidemment dispo le soir du vernissage.
Si vous désirez une invitation pour le vernissage, envoyer-nous un petit mail (info (at) blackcatbones.org). Attention, il n'y en aura que 150 !
(Cliquez sur l'image pour l'agrandir)
(Cliquez sur l'image pour l'aggrandir)
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La 4ème affiche de la série SOUS LE SIGNE DU B est enfin disponible !! Il s'agit du DEATH RACE 2000 (l'excellent film de Paul Bartel produit par Roger Corman au milieu des 70's) réalisé par notre ami Mexicain Ismael Olivares. Elle sera très bientôt disponible dans notre webshop.
La 5ème affiche sera celle de SWEET SWEETBACKS’S BAADASSSSS SONG revu et corrigé par RICA, et enfin, la dernière de cette série dédiée au "cinéma d'exploitation des années 70" sera l'affiche de ASSAULT ON PRECINCT 13 (de John Carpenter) réalisée par notre chèr ami Lyonnais Der Komissar. Cette dernière sera très probablement disponible début juin.
Je suis vraiment à la rue moi, des fois... Je viens de recevoir il y a quelques jours un mail de mon ami Mathieu déclarant que la version 2.O de son site BLUES RESET était mis en ligne.
1ère surprise, je me rend compte que je ne connaissais même pas la version 1.O du site. Pire encore, je me rend compte que je ne savais même pas que Mathieu faisait de la photo et que son amie dessinait.
Y'a pas de quoi être fièr ! Je vous invite donc à visiter sur le champs ce site très fourni en dessins... hybrides, et en photos très diverses (cette diversité étant due à une multitude de formats et de techniques utilisées).
Ce mois-ci, CREVE ! est chroniqué dans la version française de la revue ROLLING STONE. C'est avec un certain amusement que nous découvrons que le livre de Navette a pour voisin dans ces colonnes le... "roman" de Marc Maggiori. Oui, vous avez bien lus, le ROMAN de Marc Maggiori !
Y'en a vraiment qui doutent de rien. Non content d'être le chanteur d'un des plus mauvais groupes français de soft-métal for teenagers (Pleymo), non content de se prétendre graphiste en se faisant maître ès pillage de tout ce qui se fait de bien niveau animation, Marc Maggiori s'enorgueillit désormais d'être romancier.
Amateurs de Littérature (avec un "L" majuscule), j'ai une mauvaise nouvelle : l'extermination de l'espèce des écrivaillons n'est pas pour demain. J'ai même l'impression qu'elle pullule de jour en jour. Le problème n'est pas tant au fond que les démocraties marchandes continuent de nous vendre l'idée que chaque citoyen est "un artiste en puissance", que l'Homo Festivus n'est jamais totalement accompli tant qu'il n'a pas objectivé son petit égo, sa médiocre petite expérience ou ses prétendues "idées" dans un livre. Non, le vrai drame c'est qu'il existe tant de maisons d'éditions pour éditer cette increvable espèce. Si le marché français du livre est moribond, ce n'est pas uniquement à cause d'un problème qualitatif, mais parce que les quelques livres de qualité vendus en librairies sont étouffés sous une production massive de livres in-signifiant.
Bien sûr, loin de moi l'idée de nous placer spontanément du côté des "producteurs de livres de qualité", du côté des "maisons d'éditions exigeante" (vu notre taille, nous nous sentons plutôt "hors-jeu" pour le moment). Cependant, il faut savoir que si nous avons décidés d'éditer uniquement des livres d'illustrations, ce n'est pas par manque d'amour pour l'écriture, mais bel et bien par refus d'éditer de la mauvaise littérature (étant donné les maigres chances que pourrait avoir une jeune maison d'édition comme la nôtre d'éditer des romans ou des essais dignes de ce nom), par refus de participer à l'embouteillage.
Si nous éditons des livres d'illustrations, c'est non seulement parce que nous nous passionnons pour ce médium, mais aussi parce que nous avons une idée trop haute de ce que doit être la littérature.
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"Si la littérature ne vous change pas en profondeur, si le fait d'écrire ne vous précipite pas vers un mur de feu qui consume tout ce qui en vous peut être consumé, autant devenir buraliste, ou huissier de justice, ou journaliste aux Inrockuptibles". Maurice G. Dantec
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"La littérature ne périt pas parce que personne n’écrit, mais quand tout le monde écrit". Nicolás Gómez Dávila
Ca y est, la quatrième couleur a été posée sur l'affiche "EL SAGRADO CORAZON DEL LUCHADOR" de Jorge Alderete. Quatre petits coups de massicot plus loin et l'affiche sera disponible via le BLACK CAT BONES' VOODOO FUCKING MAGIC STORE ! Pour info, elle sera vendue 35 euros.
Et hop ! Une couche supplémentaire (moi j'en connais un autre qui en tient aussi une sacrée couche, en plus de maitriser photoshop, ahahah) !
J'ai lu une fois quelque part dans un livre (peut-être dans un Dantec) que les idées ne nous appartiennent pas, qu'elles sont dans l'air du temps. Que ce n'est jamais nous qui avons une idée, mais que les idées naissent plutôt de la confluence de souvenirs, d'influences, de récurrences. Que nous sommes le réceptacle d'une opération qui va transformer ce flux en en une idée singulière, individuée. Bref, une sorte de principe incarnationnel de la pensée.
Pour être franc, ce n'est pas la première pensée qui m'est venue lorsque j'ai découvert l'image qui illustrait la page Myspace des VEDETTES (groupe pseudo décadent-décalé représentant la france à l'Eurovision -ouais, ça existe encore- 2007 produit par le un-peu-plus talentueux décadent-décalé Katerine). Ma première réaction a plutôt été de me dire "Putain, alors elles, elles se sont pas faites chier". Et puis en y réfléchissant un peu, en menant ma petite enquête, j'ai découvert que cette illustration était -quasi- l'oeuvre de l'artiste contemporain Eric Pougeau (merci Patty).
Après avoir demandé aux VEDETTES d'où sortait cette photo, elle nous ont répondues que c'était elles qui l'avait crées. Après avoir ardemment cherché sur le net, nous avons effectivement retrouvé l'image de la couronne, mais non pas avec le slogan CREVE !, mais bel et bien avec le slogan... SALOPE.Reste donc à savoir si on peux légitimement se revendiquer "créateur" d'une photo quand on s'est contenté de bidouiller une image pré-existente sur photoshop.Enfin... loin de moi l'idée d'en faire tout un plat pour une vulgaire "illustration Myspace". Pour moi, l'affaire est donc conclue.Pour le reste, démerdez-vous avec votre conscience (et avec Eric Pougeau), les filles.
Est-ce que le fait d'habiter au Japon a changé quelque chose à votre style ? Entre Angora et Fraise et Chocolat, mon style a énormément changé. Je ne le dois pas spécialement au Japon, bien que le fait d'avoir pris des cours de calligraphie m'ait sans doute aidée à libérer mon trait. C'est Frédéric qui m'a le premier encouragée à prendre ce chemin. J'avais commencé à dessiner Fraise et Chocolat dans le style d'Angora, mais il m'a vite fait comprendre que mes esquisses initiales étaient beaucoup plus vivantes et que je devais m'en approcher le plus possible dans la version définitive. C'était difficile au début, je redessinais des dizaines de pages, c'était à s'en arracher les cheveux... Et puis Loïc Néhou d'Ego comme X, à qui Frédéric et moi avions dans un premier temps présenté le projet, n'était pas d'accord avec cette nouvelle direction graphique. Après quelques mois de doutes et d'essais infructueux, j'ai montré les pages à Joann Sfar, qui m'a dit exactement la même chose que Frédéric et m'a donné des conseils supplémentaires. Et là, quelque chose s'est débloqué et j'ai pu terminer l'album. À ce propos, je voudrais rectifier une fausse information que j'ai pu lire sur internet : Ego comme X n'a pas "refusé" Fraise et chocolat parce qu'il le trouvait trop "vulgaire" ! Loïc Néhou, le directeur éditorial, à qui j'avais confidentiellement montré l'intégrale des esquisses dialoguées, était au contraire très enthousiaste, nous félicitant pour "ce livre important" et "audacieux dans son propos" (je cite des fragments de notre correspondance). Si le livre n'est finalement pas paru chez Ego comme X, c'est uniquement parce que le nouveau dessin ne convenait pas à Loïc Néhou. Il me demandait de revenir à celui d'Angora... Voilà comment j'ai finalement montré le projet à Benoît Peeters des Impressions Nouvelles, qui l'a immédiatement accepté, avec beaucoup de chaleur.Au niveau du trait, vous essayez désormais d'aller droit au but du premier coup.Oui, c'est plus rapide, plus efficace et infiniment plus amusant ! Plus imprévisible aussi. Quand j'y arrive effectivement "du premier coup", je suis contente car j'ai fait mon dessin en 30 secondes... Malheureusement, c'est très, très rare... Parfois je dois m'y reprendre à 30 fois avant d'arriver à faire croire que j'y suis arrivée du premier coup! (rires) La première fois que j'ai vu ce processus décortiqué, c'était il y a 10 ans lors d'une expo Bretécher à Angoulême. Comme Reiser, elle a un dessin très jeté, et beaucoup de gens pensent que c'est "facile", que "même mon cousin il peut le faire"... Eh bien dans cette expo, ils avaient montré tous les dessins qu'elle avait faits (une vingtaine) pour aboutir à un seul dessin. Ca m'avait beaucoup impressionnée à l'époque.En lisant les articles de presse compilés sur votre site, je me suis rendu compte que la musique occupait une grande place dans votre vie. Mais contrairement à des auteurs comme Larcenet ou Ivan Brun, ça ne transparait pas du tout dans vos dessins et vos BD.Dans Angora, il y a de discrètes références à Brel et au Velvet Underground. De temps en temps, j'aime rendre hommage à un artiste en utilisant le titre d'une de ses chansons pour une histoire courte. Mais je n'aime pas trop quand un auteur de BD propose une bande-son à écouter en lisant son livre... Ca peut fonctionner seulement si le lecteur connait déjà la chanson... De manière générale, je n'aime pas tout ce qui sort le lecteur de la narration propre. Et puis quand je lis un livre, j'aime le faire en silence. Quand je dessine, par contre, j'écoute pas mal de musique, et peut-être que ça influence mon dessin, son rythme ?Vous écoutez quoi alors ?Depuis mes 15 ans, mes goûts ont relativement peu changé, j'écoute principalement du rock. J'ai commencé avec Nirvana, Bikini Kill, les Pixies, les Smiths, Weezer... En ce moment je suis folle des Mates of State, un groupe qui joue des choses très dynamiques, très pop, pleines de vie. Je guette le dernier album de Blonde Redhead, qui devrait sortir le jour de mon anniversaire, le 10 avril prochain... Comme je reste souvent 8 heures par jour à ma table à dessin, j'écoute énormément la radio via internet. J'aime beaucoup l'émission Là-bas si j'y suis sur France Inter. Ca me permet de me tenir informée, d'autant plus que cette émission aborde toujours l'info sous un angle différent. J'écoute aussi Sur les docks, une émission documentaire sur France Culture. Beaucoup de gens sont surpris que vous soyez à la fois dessinatrice et docteur en pharmacie. Pourtant, on y trouve un gros point commun, dans la mesure où le pharmacien soigne les corps, et l'artiste soigne l'âme. (rires) Quand je dessine, je pense assez peu à mon métier de pharmacien, mais le pharmacien peut aussi soigner l'âme... Je me rappelle quand j'étais au comptoir, j'adorais discuter avec les gens, ou plutôt les écouter... Les discussions partaient sur leur santé, et comme c'est quelque chose de très intime, ils débordaient souvent sur leur vie privée, leurs problèmes de couple... On exerce toujours un métier selon sa personnalité...
(Fin)Merci à Aurélia Aurita et Benoît Peeters des Impressions Nouvelles.
(crédit photo : Thomas Berthelon) Angora traite plutôt des états d'âme et des petites névroses. Pour votre second album, vous parlez avant de tout de sexe et d'amour (même si visiblement, les médias ont avant tout focalisé sur l'aspect sexuel de l'album). Pourquoi ce choix ? Est-ce que vous pensez que le sexe, malgré son omniprésence obsessionnelle dans toutes les sphères de la société moderne reste le grand impensé ? Le grand mystère ? Je ne suis pas emballée par la manière dont le sexe est traité dans les médias de masse. Il n'y a pas de réflexion, on se contente de jouer avec les instincts les plus basiques, le sexe est là pour faire vendre du savon et des bagnoles. Mais pour ce qui me concerne, peut-on vraiment parler de "choix" ? Un artiste "choisit"-il vraiment ses sujets ? Parler d'amour et de sexe a plutôt été un besoin, une nécessité à dire les choses comme je les ressentais.Ces dernières années, on a eu droit à beaucoup d'artistes féminines qui parlaient de sexe, mais globalement d'une manière très revancharde et amère, voire violente, je pense à Catherine Breillat, Virginie Despentes, Catherine Millet. C'est assez courageux de votre part de se placer après ça sur le terrain de la naïveté, sur un retour vers des valeurs plus simples, limite fleur-bleue.On me demande souvent ce que je pense de ces trois auteures... Je me suis intéressée de près à leur travail et il y a des choses que j'apprécie, d'autres moins. Je ne trouve pas que Catherine Millet soit violente, au contraire, ce qui m'a frappée dans son livre c'est l'impression de sérénité qui s'en dégage.Cependant, je ne vois pas pourquoi vous parlez de "courage". J'ai juste dessiné ça comme je le sentais.Si vous ne vous êtes pas positionné contre ces auteurs, vous vous êtes tout de même positionné contre l'époque.Je ne sais pas si je l'ai fait consciemment, mais comme je le disais plus haut, il y a beaucoup de choses qui m'insupportent, le sexe comme objet de consommation ou de scandales, l'hypocrisie avec laquelle on en parle, etc. Fraise et Chocolat essaie plutôt de raconter une histoire d'amour toute simple, presque idéale.Quel effet a eu le fait d'évoquer au grand public votre vie sentimentale, vos doutes, vos questionnements sur votre vie sentimentale ? Frédéric et moi y étions préparés bien sûr, nous y avons pensé dès le départ. Nous en parlons beaucoup, ça demande beaucoup de complicité. C'est devenu "notre truc à nous"...Comment a réagi Frédéric face au fait de se retrouver de l'autre côté ?Ce n'est pas la première fois. N'avez-vous pas lu Mariko Parade, réalisé en collaboration avec Kan Takahama ? L'album est paru en 2003, il rassemble des histoires courtes de Frédéric parues initialement dans divers supports, sur plusieurs années, mais toutes créées avec le même modèle, Mariko. Ces histoires sont reliées entre elles, englobées dans une fiction dessinée par Kan, qui s'approprie pour l'occasion les personnages de Frédéric et Mariko. L'ensemble forme un récit cohérent, où Frédéric est à la fois auteur et modèle. Ainsi, c'est avec ce livre qu'il a commencé à se retrouver "de l'autre côté". Fraise et Chocolat s'inscrit dans ce processus, et le personnage de Frédéric continue à vivre sa vie à travers mes albums...Par rapport à ce parti-pris autobiographique, quel est votre garde-fou ? La limite à ne pas dépasser ? A quel moment vous décidez que telle ou telle chose ne peut pas être racontée ?La seule question que je me pose c'est: "Est-ce que ça mérite d'être raconté ?". Si je considère qu'un événement, même "intime", vaut la peine, alors je fonce. Avec l'expérience, j'arrive de mieux en mieux à faire la séparation entre ma vie privée et mon travail, ce qui me permet d'aller plus loin. Pour moi, le seul "garde-fou" valable en autobiographie c'est la lucidité qu'on porte sur ses propres capacités artistiques. Parfois, il faut accepter le fait qu'on est incapable de raconter tel ou tel événement parce qu'on n'a pas assez de recul, d'expérience ou de talent. Qu'est-ce que le dessin pour vous ? Un exutoire quotidien ? Un truc spontané ? Ou bien est-ce que vous réfléchissez beaucoup avant de vous mettre au travail ?Depuis Fraise et Chocolat, j'essaie de ne pas faire de crayonné, de travailler le dessin comme une écriture. Bien sûr, je fais toujours des croquis de mise en place, très sommaires. Et quand je dois dessiner des choses un peu compliquées ou inhabituelles, je m'appuie sur des photos de repérage. Puis je me laisse aller, j'improvise. Ce que j'aime par dessus tout, c'est me surprendre moi-même en dessinant. Je crois qu'arriver à se faire rire ou pleurer en dessinant est très bon signe, on peut alors espérer que le lecteur va suivre.Je lisais sur votre site internet que vous avez récemment refusé de participer au concours des "Jeunes Talents de la BD", que vous avez demandé à être retirée de la sélection. Comme je l'ai expliqué dans mon premier courriel aux organisateurs, repris en partie sur mon site, je n'admets simplement pas que des œuvres par essence uniques et singulières soient jugées et soumises à une hiérarchie. Mais ils n'ont pas voulu accéder à ma demande et ont préféré me reléguer "automatiquement" à la dernière place. C'est pourquoi j'ai tenu à faire un petit communiqué sur mon site pour expliquer tout cela.Ce n'est tout de même pas un acte anodin, ces concours restent tout de même très prisés auprès des dessinateurs français. Est-ce que vous pensez que le fait d'habiter au Japon vous donne un peu plus de recul, vous permet d'être un peu moins en attente vis à vis de ce genre de concours ?Mille et une raisons poussent les auteurs à accepter les prix. Le besoin de reconnaissance, l'argent, la pression des éditeurs, l'indifférence, la facilité, la vanité... Mais je pense qu'il existe seulement deux types de refus. Le refus sur la forme (l'auteur n'est pas d'accord avec la composition du jury, il ne se sent pas valorisé par les autres œuvres en compétition, etc.) et le refus sur le fond, sur le principe même des prix. C'est dans ce dernier cadre que ma démarche s'inscrit et mon refus n'a donc rien à voir avec ma situation géographique.(Suite et fin ICI)
AURELIA AURITA, tu connais ? Alors toi-même tu sais. Si tu ne la connais pas, je ne te donne pas plus de 10 minutes avant de tomber sous le charme de cette jeune dessinatrice (27 ans) auteur du très délicatement nommé ANGORA en 2003 et de FRAISE ET CHOCOLAT en 2006, adorable album racontant sa rencontre et sa relation passionnelle avec le dessinateur français exilé au japon Frédéric Boilet. Même principe que pour l'interview d'IVAN BRUN, je poste ici l'intégralité de l'entretien réalisé avec Chenda (toi aussi t'as cru qu'Aurélia Aurita c'était son vrai nom ? On est naïfs, hein ?), entretien réalisé pour les besoins d'un article que je prévois d'écrire pour les pages culturelles du quotidien suisse LE COURRIER. Feu !
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Vous êtes en France depuis quand et pour encore combien de temps ? Aurélia Aurita : Je suis en France depuis quelques semaines, mais je suis sur le point de partir en Bolivie avec Frédéric (Boilet, ndlr) pour un festival BD. Votre éditeur me disait que vous étiez venue passer quelques semaines en France afin de terminer le 2e tome de FRAISE ET CHOCOLAT. Je m'étais imaginé une sorte de retraite monastique.Oui c'est un peu ça, je suis au calme, à la campagne. Il y a des petits oiseaux, un coq, des lapins...Qu'est-ce qu'est exactement que ce festival bolivien où vous êtes invités ?Le festival existe depuis 5 ans, il se déroule à La Paz. L'expo Nouvelle Manga, qui tourne dans le monde depuis son lancement au Japon fin 2005, y sera présentée. Il semble qu'on nous attende aussi à l'Alliance Française de Cochabamba... C'est quelque chose de plutôt informel, je ne sais pas trop ce que ça va donner. On a été un peu prévenus à la dernière minute. Fredéric est allé une fois au Brésil, mais personnellement je ne suis jamais allée en Amérique du Sud. Bref, on verra bien ce qui nous attend !Le saut vers le grand inconnu alors !Pour revenir au premier volume de FRAISE ET CHOCOLAT, combien de temps avez-vous travaillé dessus à partir du moment où vous avez commencé à dessiner ?Pour le dessin, ça m'a pris un peu moins d'un an. J'ai dû commencer en avril 2005 et j'ai terminé en février 2006. Pour le scénario, j'avais commencé à y réfléchir en décembre 2004.Vous l'avez dessiné pour l'éditeur chez qui il est finalement sorti, ou bien est-ce que vous avez créé cet album sans vous en soucier ?Au départ, c'était juste entre Frédéric et moi. En 2004, un peu avant Noël, j'étais en France, lui au Japon, et je lui ai envoyé par courriel les esquisses des quarante premières pages. Elles lui ont beaucoup plu (c'était le but recherché...) et c'est lui qui m'a encouragée à continuer, à en faire un livre. Ensuite, nous avons cherché l'éditeur ensemble.Quels sont vos premiers kiffs-BD étant enfant ? Vous étiez plutôt branchée BD franco-belge, comix US ?Quand j'étais enfant je lisais ce que j'avais sous la main. Mon premier album c'était La soupe aux Schtroumpfs, donc de la BD franco-belge. Quand j'ai eu fini de lire tous les Schtroumpfs, j'ai lu tous les Astérix, et en même temps Le Journal de Mickey et Picsou Magazine, mon premier pas dans l'univers du comix américain. Après, il y a eu l'explosion des dessins animés japonais sur La Cinq au milieu des années 80. On peut donc dire que j'ai grandi sous ces trois influences...Qu'est-ce que vous répondez aux gens qui vous disent que l'autofiction est un genre réservé aux gens qui n'ont pas d'imagination ? J'avoue qu'on ne m'a jamais posé la question directement. Je ne vois pas les choses de cette manière, les plus grands auteurs de fiction s'inspirent de choses qu'ils ont vues, entendues, voire vécues. Je ne crois pas à l'imagination pure, aux idées qu'on sort du chapeau. Quant à l'autobiographie, c'est d'abord une mise en scène du "réel", et là où il y a mise en scène, il y a fiction, et donc "imagination".L'autofiction est quand même un pari très risqué d'un point de vue artistique, l'auteur est toujours sur la corde raide, les possibilités de tomber dans l'ennui, le vide, l'inintéressant sont nombreuses quand on traite du banal, du quotidien.Ça me rappelle cette citation de Flaubert : "Il faut peindre bien le médiocre". En effet, c'est à l'artiste de rendre l'ordinaire extraordinaire. Mais je ne comprends pas très bien la notion de "risque" dans tout ça?Je pensais à cette incapacité d'apporter ce nécessaire surplus de poésie dans cette "mise en fiction" du quotidien, de ne pas parvenir à donner de forme au banal.C'est vrai qu'il existe des autobiographies très ennuyeuses, mais il y a également des auteurs de récits d'aventures qui n'arrivent pas à donner forme à leurs histoires rocambolesques. C'est une question qui se pose pour tous. Chaque histoire est un pari, un risque à prendre, sachant que certains sujets sont peut-être plus difficiles à traiter que d'autres. Avant de commencer à travailler dans une direction autobiographique, est-ce que vous aviez préalablement réfléchi à votre approche, ou bien est-ce que vous avez avancé à l'instinct ?Ça s'est fait petit à petit. Quand j'avais 13-14 ans, je lisais des magazines d'humour comme Fluide Glacial et des mangas style Dragonball. J'ai donc dessiné mes toutes premières histoires dans ce genre hybride et improbable : de l'humour Fluide Glacial servi par un dessin manga...A 15 ans, j'ai découvert en kiosque la revue Bananas, avec des histoires courtes de Crumb, Baudoin, Neaud... Ca a été un choc pour moi: ces histoires du quotidien et de l'intime, je les ai tout de suite aimées. Mais j'étais loin de m'imaginer qu'un jour, moi aussi, je raconterais la mienne. Il m'a fallu encore 10 ans pour oser franchir le pas. J'ai commencé en dessinant une héroïne à tête ronde, qui n'avait pas de nom et qui changeait de rôle à chaque histoire, comme une actrice. Et puis il y a eu Angora, je ne sais pas si vous l'avez lu...Oui, oui, j'allais justement vous en parler, c'est un album qui tâtonne entre fiction et autofiction. Il est à la fois très structuré, en même temps il semble construit sur des situations vécues. Impossible pour le lecteur de ne pas ressentir une grosse proximité avec l'auteur.La plupart des saynètes ont été vécues soit par moi, soit par des amis, d'où cette impression sans doute... De toutes façons, on ne parle bien que de ce qu'on connaît... (La suite ICI)
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