MY FAVORITE MOVIES # 07
GO GO SECOND TIME VIRGIN
koji wakamatsu (1969)
GO GO SECOND TIME VIRGIN
koji wakamatsu (1969)
Contrairement au cinéma érotique Européen et Américain où n'ont jamais culminé que de fades oeuvrettes formalistes à la libertine mollesse, le "film rose" japonais (pinku-eiga) a eu très tôt (pour ne pas dire dès sa création) conscience de son devoir de distiller, au-delà de ses impératifs libidineux, les rudiments d'un discours critique.
Outre la nature première du genre, impudique et charnelle, embarrassante en soi pour les prudes mentalités des 60's, nombreux sont les cinéastes de cette époque à s'être servis du pinku-eiga pour aborder des thèmes ouvertement politiques.
Tout cela sans jamais négliger l'élégance des formes.
Outre la nature première du genre, impudique et charnelle, embarrassante en soi pour les prudes mentalités des 60's, nombreux sont les cinéastes de cette époque à s'être servis du pinku-eiga pour aborder des thèmes ouvertement politiques.
Tout cela sans jamais négliger l'élégance des formes.
De cette tendance, retenons deux réalisateurs : Tetsuji Takeshi (dont le sulfureux BLACK SNOW en 1964 fit scandale à cause de ses visées anti-américaniste) et Koji Wakamatsu. Véritable "personnage" dont la biographie porte déjà en elle toutes les promesses d'un juteux scénario (surnommé "l'homme aux cent films", il fut d'abord étudiant vétérinaire avant de fuguer et devenir apprenti yakusa pour finalement se résoudre à devenir réalisateur à sa sortie de prison), Wakamatsu fut, à la vue des divers procès pour obcenité qui furent intentés à Tetsuji Takeshi ou encore Seijun Suzuki (pour son splendide LA BARRIERE DE CHAIR), l'un des premiers réalisateurs à comprendre l'urgence de devenir son propre producteur.
Mais peut-on vraiment parler de pinku pour le cas Wakamatsu ? Pas vraiment, à moins que des scènes de viols et d'auto-mutilation parviennent à vous emoustiller... Erotique? non. Pellicule terroriste, oui (Wakamatsu n'a t-il jamais déclaré qu'il était devenu réalisateur parce que le cinéma lui permettait de tuer des flics de manière légale ?).
La nudité chez Wakamatsu est quasiment toujours dénuée de toute sensualité. Plus proche de Thanatos que d'Eros, la chair exhibée de GO, GO SECOND-TIME VIRGIN est une prison, une prison rosée ne proposant guère que deux issues : une sortie vers une quasi impossible quête du bien-être, ou vers la mort. Loin d'être le moyen de toutes les transcendances, le corps embarasse ici ceux qui se le traînent, retient prisonnier les jeunes esprits qui souffrent à l'intérieur. Le corps n'est plus vecteur du plaisir, mais messager des pulsions mortifères. Instincts de vie, pulsions de mort, haine de soi, rejet de l'autre, dégoût du décor, le corps comme théâtre des conflits intérieurs.
Mais peut-on vraiment parler de pinku pour le cas Wakamatsu ? Pas vraiment, à moins que des scènes de viols et d'auto-mutilation parviennent à vous emoustiller... Erotique? non. Pellicule terroriste, oui (Wakamatsu n'a t-il jamais déclaré qu'il était devenu réalisateur parce que le cinéma lui permettait de tuer des flics de manière légale ?).
La nudité chez Wakamatsu est quasiment toujours dénuée de toute sensualité. Plus proche de Thanatos que d'Eros, la chair exhibée de GO, GO SECOND-TIME VIRGIN est une prison, une prison rosée ne proposant guère que deux issues : une sortie vers une quasi impossible quête du bien-être, ou vers la mort. Loin d'être le moyen de toutes les transcendances, le corps embarasse ici ceux qui se le traînent, retient prisonnier les jeunes esprits qui souffrent à l'intérieur. Le corps n'est plus vecteur du plaisir, mais messager des pulsions mortifères. Instincts de vie, pulsions de mort, haine de soi, rejet de l'autre, dégoût du décor, le corps comme théâtre des conflits intérieurs.
Unité de temps, unité de lieu, GO, GO SECOND-TIME VIRGIN se déroule sur deux nuits. Quasi unique décor, le toît d'un immeuble. Sans fard, le film s'ouvre sur le viol de Poppo, mélancolique petit ange sacrifié au plus près du ciel sur l'autel des plaisirs immédiats par une bande de petites frappes. Tsukio, jeune poète lunaire observe la scène sans y prendre part; sans non plus chercher à lui venir en aide. Au petit matin, abandonnée à même le sol, Poppo, ne trouvant pas la force de se suicider demande à Tsukio de mettre fin à ses jours. Tsukio, qui se révèle être, lui aussi un être de félure, va bientôt se révéler être déjà un meurtrier. Il demeure pourtant incapable de répondre aux désirs (de sexe, de mort) de l'adolescente.
Qu'ils soient victimes ou bourreaux, bourreaux devenants victimes ou victimes devenant bourreaux, les jeunes protagonistes de GO, GO SECOND-TIME VIRGIN sont des carcasses désincarnées, superficielles. Leurs actes ne répondent à aucune logique, sinon celle des assouvissements "immédiats". Enfants gâtés de la consommation, ils se comportent dans la vie comme au supermarché, disposent du corps des autres comme d'une marchandise bientôt périmée.
Scène de toutes les perditions, le toit abandonné sur lequel le film se déroule joue le même rôle que le désert ou les îles rocheuses des films d'Antonioni, un lieu aride confinant les personnages dans l'inconsistance de leurs âmes, ne reflétant que leur propre impuissance à se comprendre eux-mêmes, donc entre eux. Un lieu ouvert vers le ciel que les lois de la gravité empèchent de quitter. Une île cernée d'un océan de béton, agitée par l'absurde et incessant va et vient du trafic automobile.
Qu'ils soient victimes ou bourreaux, bourreaux devenants victimes ou victimes devenant bourreaux, les jeunes protagonistes de GO, GO SECOND-TIME VIRGIN sont des carcasses désincarnées, superficielles. Leurs actes ne répondent à aucune logique, sinon celle des assouvissements "immédiats". Enfants gâtés de la consommation, ils se comportent dans la vie comme au supermarché, disposent du corps des autres comme d'une marchandise bientôt périmée.
Scène de toutes les perditions, le toit abandonné sur lequel le film se déroule joue le même rôle que le désert ou les îles rocheuses des films d'Antonioni, un lieu aride confinant les personnages dans l'inconsistance de leurs âmes, ne reflétant que leur propre impuissance à se comprendre eux-mêmes, donc entre eux. Un lieu ouvert vers le ciel que les lois de la gravité empèchent de quitter. Une île cernée d'un océan de béton, agitée par l'absurde et incessant va et vient du trafic automobile.
Hors du monde. Rejetés par l'extérieur, saturés de l'intérieur, quel espace leur reste t-il? Celui du crime et du suicide, nous dit Wakamatsu, qui fait peser sur son film le poids de la violence aveugle du champ presque aussi lourdement que celui du hors-champ. Presque abandonnés à leur solitude et à leur errance intérieure, on imagine très bien la famille de Tsukio gros travailleurs, grands prétendants dans la course à la réussite sociale, fantômes du domicile familial, manufacturiers d'une banale monstruosité.
On imagine aussi très bien à l'autre bout de cette ville bruyante et pourtant si étrangement dénuée de ses sons agressifs (la bande-son originelle a été dépouillée puis sobrement recomposée pour rendre au silence ses affinités avec la mort), les héros des autres films de Wakamatsu, ces terroristes érotomanes, ces garçons introvertis devenus criminels sexuels, tenter de se débattre à leur façons dans cet espace saturé de publicité, d'ordres et de frustrations.
Chef opérateur hors-pair (cadres minutieusement composés, photographie noir et blanc très contrastée) et amateurs de belles lettres (poèmes fleurant bon la méthode cut-up de Burroughs, dialogues chimériques mais rafinés), Koji Wakamatsu compose son film avec une méticulosité de peintre qui contraste avec la rapidité dans laquelle se déroula le tournage (4 jours passés sur les toits du propre immeuble des bureaux de Wakamatsu productions).
La beauté formelle du film n'empêche cependant pas l'animosité de quasiment l'emporter. Le pessimisme qu'il convoque ne condamne finalement jamais l'homme, mais la société qui le presse au point de lui faire perdre la raison. Ce thème, nous le retrouverons également dans un autre film dont Wakamatsu sera, non pas le réalisateur, mais le producteur exécutif six ans plus tard, et qui reste aujourd'hui l'oeuvre transgressive du cinéma Japonais la plus vue au monde : L'EMPIRE DES SENS de Nagisa Oshima.
On imagine aussi très bien à l'autre bout de cette ville bruyante et pourtant si étrangement dénuée de ses sons agressifs (la bande-son originelle a été dépouillée puis sobrement recomposée pour rendre au silence ses affinités avec la mort), les héros des autres films de Wakamatsu, ces terroristes érotomanes, ces garçons introvertis devenus criminels sexuels, tenter de se débattre à leur façons dans cet espace saturé de publicité, d'ordres et de frustrations.
Chef opérateur hors-pair (cadres minutieusement composés, photographie noir et blanc très contrastée) et amateurs de belles lettres (poèmes fleurant bon la méthode cut-up de Burroughs, dialogues chimériques mais rafinés), Koji Wakamatsu compose son film avec une méticulosité de peintre qui contraste avec la rapidité dans laquelle se déroula le tournage (4 jours passés sur les toits du propre immeuble des bureaux de Wakamatsu productions).
La beauté formelle du film n'empêche cependant pas l'animosité de quasiment l'emporter. Le pessimisme qu'il convoque ne condamne finalement jamais l'homme, mais la société qui le presse au point de lui faire perdre la raison. Ce thème, nous le retrouverons également dans un autre film dont Wakamatsu sera, non pas le réalisateur, mais le producteur exécutif six ans plus tard, et qui reste aujourd'hui l'oeuvre transgressive du cinéma Japonais la plus vue au monde : L'EMPIRE DES SENS de Nagisa Oshima.
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GO, GO SECOND-TIME VIRGIN est disponible en DVD zone 1
(version originale sous-titrée en anglais) aux éditions Image Ent.
GO, GO SECOND-TIME VIRGIN est disponible en DVD zone 1
(version originale sous-titrée en anglais) aux éditions Image Ent.
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